Ca colle et ça pue ! Entre
les taches blanches ou noires faites par des chewing-gums fossilisés mais qui
exhibent encore assez de vigueur pour s'attacher aux semelles de vos mocassins,
les mégots de cigarettes -certains encore allumés-, les crachats bien mousseux,
blancs ou verts selon l’état des poumons du cracheur, les innombrables crottes
de chiens qui ponctuent votre trajet, que dis-je ? Votre course
d’obstacles !, si vous arrivez à destination sans anicroche ni tâche, vous
êtes un miraculé ou un saint !
« Faire le trottoir » a aussi changé de signification : Parfois il
faut marcher en hiéroglyphe égyptien quand les tables des cafetiers débordent
et vous poussent sur la chaussée, au risque de vous faire écraser par un bus…
Parfois aussi il faut se frayer un chemin au travers du nuage opaque de tabac
des fumeurs relégués à la terrasse du troquet, qu’il pleuve, neige ou vente…
D’autres fois, il faut partir de chez soi 30 minutes en avance… Partir juste à
l’heure, c’est arriver en retard, tellement les trottoirs sont aussi encombrés
que les rues…
Ville piétonne, certes, mais ville piétonne du Sud avant
tout ! On avance nonchalamment et élégamment, un peu comme le courtisan de
Joachim du Bellay dans Marcher d’un grave pas : on croise une tête connue,
on s’arrête pour un brin de causette, on crée un embouteillage… de trottoir…
Le
temps défile pour le passant pressé et s’immobilise pour le flâneur.
© Sarah Diligenti Avril 2013, Retour de France